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Vous ne parvenez pas à faire vibrer votre musique ?
Malgré tous vos efforts, vous n’êtes pas satisfait de votre interprétation ?
Vous avez l’impression que quand vous jouez, vous êtes trop mécanique ? Que la sensibilité de l’interprétation ne passe pas ? De jouer comme un robot ?
Ou alors, quand vous jouez votre interprétation ne « sonne » pas ?
La bonne nouvelle, c’est que vous n’êtes pas un robot.
Et ce qui va vous différencier de la machine, c’est d’apporter des nuances et des interprétations. C’est à travers elles que vous parviendrez à vous exprimer.
C’est pour cela que j’ai décidé aujourd’hui de vous expliquer et de vous montrer les principales nuances à appliquer tout de suite dans votre jeu.
Je les appelle les nuances ou les interprétations de base, car ce sont celles à maîtriser absolument.
Piano et Forte
On va commencer tout de suite par la nuance peut-être la plus évidente, à savoir jouer plus ou moins fort.
Je vais vous raconter une petite histoire.
La première fois que j’ai entendu le mot piano en parlant de la nuance, je n’avais rien compris du tout. J’étais gamin, en cours avec mon prof, et il m’a dit : « là, tu dois jouer piano. »
« Ben oui, je suis au piano. Mais qu’est-ce qu’il me veut..? »
En fait, piano est un terme musical qui signifie « avec douceur », à ne surtout pas confondre avec « doucement ». J’y reviendrai plus tard.
On l’écrit avec la lettre p (incroyable, on ne s’en serait pas douté).
Et on va opposer cette nuance à forte, qui signifie jouer fort, écrit avec la lettre f.
En fait, ces 2 nuances se déclinent en d’autres encore de façon graduelle.
Du plus doux au plus fort, on a donc :
- Pianissimo (pp) : vraiment pas fort du tout
- Piano (p) : avec douceur
- Mezzo piano (mp) : un peu plus fort, mezzo signifiant modérément
- Mezzo forte (mf) : encore un peu plus fort, modérément fort en fait
- Forte (f) : jouer fort, tout simplement
- Fortissimo (ff) : très fort.
Il y en a d’autres, mais avec ça vous pouvez déjà aller bien loin !
Évidemment, jamais vous ne trouverez une nuance par note comme sur ce schéma.
Dans certains morceaux, il faudra savoir passer de piano à forte d’un seul coup. Mais il arrive qu’il faille le faire de façon progressive.
Dans ce cas, on parle de crescendo pour aller progressivement de plus en plus fort, et decrescendo pour aller de moins en moins fort.
Voici les symboles que vous trouverez sur les partitions :
Le symbole < signifie donc crescendo, vous jouerez donc de plus en plus fort dans la première mesure. Le symbole > signifie decrescendo, vous jouerez donc de moins en moins fort dans la 2e mesure.
Ce sont les mêmes symboles que ce que vous avez appris à la petite école pour indiquer qu’un nombre est supérieur ou inférieur à un autre. On ajuste juste les longueurs.
Avant de passer à d’autres éléments d’interprétation de base, je voudrais vous donner une petite précision technique par rapport aux nuances.
Je vous dis toujours de bien travailler votre articulation pour pouvoir ensuite gagner en vitesse et vous contrôler.
On pourrait croire que c’est uniquement pour jouer fort.
En réalité, c’est largement incomplet !
Si vous pensez qu’il n’y a pas besoin de travailler votre articulation parce que vous jouez de la musique douce, vous vous trompez ! Et grandement !
Jouer avec douceur nécessite une bonne technique, car cela demande une bonne maîtrise du clavier.
Je vous garantis que sans une bonne articulation, vos doigts vont filer. Vous ne serez pas régulier et le volume sonore ne sera pas le même pour toutes les notes.
Pour résumer : vous aurez des problèmes de régularité rythmique et de volume.
Un petit mot maintenant sur le fortissimo (ff).
Pour jouer aussi fort, il faudra aussi des doigts !
Pour des passages courts, vous y arriverez peut-être assez facilement. Mais pour jouer dans la durée, il en faudra sous le coude !
Surtout, quand vous travaillez ces choses-là, faites très attention de ne pas vous blesser ! Allez-y pendant de courtes durées, et faites des pauses si vous avez des douleurs.
Pour progresser dans vos nuances, prenez un petit enchaînement d’accords et jouez-le du moins fort au plus fort, sans changer la vitesse ! Ensuite faites l’exercice inverse.
Les blues lents sont de bons entraînements car nombre d’entre eux ont cette structure. Ils commencent avec douceur, et montent crescendo pour souvent finir piano.
Notes piquées, notes liées
Passons maintenant à une notion qui vous apportera beaucoup. Il s’agit de bien distinguer le jeu piqué du jeu lié.
Commençons par le jeu lié.
Il s’agit de jouer sans aucune interruption du son. C’est à dire que lorsque vous relevez une touche, il faut enfoncer la suivante tout de suite.
Le jeu piqué, c’est tout le contraire !
Vous devez relever tout de suite votre doigt après avoir enfoncé la touche. En fait, vous devez rebondir sur votre touche.
L’effet donne donc une certaine légèreté dans votre jeu.
Voici le symbole des notes piquées :
L’autre nom de cet effet est le staccato.
Ralentir et accélérer
Parmi toutes les interprétations qui existent, voici celles qu’il faudra utiliser avec le plus de précautions.
Changer la vitesse est quelque chose qui peut donner un super effet, ou au contraire mettre votre morceau par terre !
Il peut donc arriver que la vitesse varie au cours d’un morceau.
Cela peut se faire d’un seul coup, pour jouer une rupture entre deux différentes parties par exemple.
Ou alors cela se fait progressivement.
Si vous jouez seul, il est très courant de jouer sur la vitesse pour développer votre expressivité.
Si vous jouez en groupe, il faudra par contre jouer régulièrement. Quand il y a un ralentissement, à la fin d’un morceau par exemple, il faudra bien le répéter pour que tout le monde soit bien synchronisé.
Mais voici le piège…
En général, dans un morceau, on maîtrise bien certains passages, et beaucoup moins d’autres car plus complexes à jouer.
Et quand on débute, on joue doucement ce qui est difficile à jouer, et on fonce à toute blinde quand c’est facile !
Du coup, la vitesse ne dépend pas du tout de l’expressivité, mais de la difficulté de jeu !
Et c’est tout le contraire d’un morceau maîtrisé. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que cela s’entend…
Pour parvenir à maîtriser cet effet, il faut donc d’abord savoir jouer régulièrement votre morceau d’un bout à l’autre.
Encore une fois, c’est le travail technique qui vous donnera les armes pour l’expressivité.
Une fois que vous savez jouer régulièrement, vous pourrez commencer à vous exprimer musicalement.
Soyez quand même très vigilent sur les ralentissements et les accélérations. N’en abusez pas.
Si vous jouez sur partition, respectez ce qui est indiqué avec les symboles rall. et accel. Ils correspondent respectivement à rallentando et accelerando.
Le plus courant est d’avoir un ralentissement à la fin d’un morceau.
Si vous jouez sans partition, le principal est de vous écouter. Si cela pose problème, enregistrez-vous, et réécoutez.
Mais je vais vous donner un autre conseil.
Écoutez un maximum de musique, par exemple des interprétations de morceaux que vous jouez, et tentez de déceler les variations de tempo dans ce que vous écoutez.
Ensuite, essayez de les reproduire.
Cela a l’air simpliste comme conseil, voire évident, mais peu de personnes le font !
À force, vous allez acquérir des reflexes.
Voyons maintenant un dernier piège : combiner les nuances.
Pourquoi parler de « pièges » ?
Je m’explique.
Nous avons vu 3 « couples » de nuances et interprétations :
- Piano et forte
- Lié et piqué
- Ralentir et accélérer
Bien entendu, vous devrez les combiner.
Par exemple jouer piano lié, ou forte et piqué, toutes les combinaisons sont possibles !
Mais gare au fameux piège…
Nous avons déjà vu des pièges dans cet article, et celui-ci est on ne peut plus courant.
Il faut combiner ces nuances de façon consciente et maîtrisée, et ne pas trop se laisser aller.
Voici l’exemple typique : accélérer quand on joue forte et ralentir quand on joue piano.
Le grand classique…
Et cela, vous pouvez le marquer en lettres d’or sur votre cheminée (ou dans vos toilettes) :
Jouer fort ne veut pas dire jouer vite !
Et vous pouvez me croire, on a vite fait de se laisser emporter !
Donc, si vous voulez travailler vos nuances piano et forte, et non les variations de vitesse, entraînez-vous au métronome.
Vous êtes averti.
Un peu de méthode…
Vous éprouvez des difficultés à appliquer tout ce que je vous ai expliqué ici ?
Peut-être qu’il vous manque un peu de technique.
Car voici le paradoxe, au risque de ne pas plaire à certains : pour avoir ce qu’il faut dans les doigts pour jouer vos nuances, vous devez d’abord effectuer un travail technique de façon robotique.
Vous vous souvenez ? Je vous avais dit que vous n’étiez pas un robot ? C’est une chance, mais il faudra s’y confronter quand même pour progresser.
Un jour, quelqu’un m’a dit : « pour pouvoir dépasser un niveau, il faut déjà l’atteindre. »
C’est judicieux de l’appliquer ici.
Comme je l’ai déjà dit maintes et maintes fois ici, commencez par travailler votre morceau en articulant au maximum, lentement en étant régulier.
Ensuite, accélérez petit à petit.
Enfin, quand vous sentez que vous avez le morceau dans les doigts, ajoutez vos nuances. Et exagérez-les !
Dans ce domaine, il vaut mieux en faire trop que pas assez !
Vous verrez que votre travail technique vous donnera le contrôle et la maîtrise de votre jeu et de votre clavier.
Ceci dit en passant : vous trouverez énormément d’exercices techniques sur ce site pour vous y aider.
Surtout, pensez qu’il vaut mieux faire trop de nuances que pas assez !
Entraînez-vous et n’oubliez pas que jouer des nuances sert à extérioriser ce que vous avez en vous.
À vous de jouer !